INTERVIEW
Sauvegarde des chevaux de prezwalski, C.Dohin de TAKH
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Univers-nature – Quels ont été les critères de sélections des chevaux ? C’était juste d’éviter la co-sanguinité ou il y avait d’autres facteurs ?
Corinne Dohin - Le critère de sélection était les liens de co-sanguinité les plus éloignés possible, rien d’autre.
Univers-nature – Pourquoi une clôture ? Vous êtes partis de 8 chevaux au départ, vous êtes maintenant à 30, je pense qu’il y a des problèmes d’espaces.
Corinne Dohin - Parce que sur le Causse-Méjean il faut cohabiter avec toute la population locale, l’agriculteur, le chasseur, …. donc le cheval de przewalski ne peut décemment pas empiéter sur les cultures, ou prendre le risque d’une balle égarée par un chasseur, c’est pourquoi on est obligé de restreindre l’étendue du terrain. Maintenant il est vrai qu’avec 30 chevaux, on arrive à un surpâturage total, et on cherche à étendre le terrain. On est en discussion avec la municipalité pour bénéficier de terrains sectionnaux, et agrandir le terrain. En Mongolie, on est à la recherche d’un terrain bien entendu sans clôtures, on ne va pas s’amuser à clôturer des milliers d’hectares, mais avec des frontières naturelles dans certaines limites (la zone actuellement retenue ferait environ 110000 ha, ndlr).
Univers-nature – Est-ce qu’il n’y a pas de problèmes comportementaux de par cet espace réduit, car normalement c’est un étalon et plusieurs juments ?
Corinne Dohin - Tout a fait ! Dans un premier temps, on a eu à faire face à une grosse agressivité de la part de l’étalon dominant. En fait, on avait un étalon dominant avec son groupe de juments, et un groupe de jeunes étalons. La normalité veut que l’on ait un étalon dominant avec ses juments et les jeunes poulains et que dès que les poulains mâles atteignent un certain âge, ils sortent du groupe chassé par l’étalon ou d’eux mêmes.
A ce moment-là, ils rejoignent le groupe des jeunes mâles qui se tient à l’écart, hors de vue de l’étalon dominant. Puis vient un moment où il y a des luttes entre le dominant et un des jeunes étalons qui sont des conflits de pouvoir.
Ce qui se passe actuellement, heureusement, c’est que malgré le terrain restreint, il y a un petit troisième groupe qui s’est formé avec un autre étalon et 2 juments, mais il y a un énorme stress de la part de l’étalon dominant qui a le plus gros groupe de juments, car il a affaire à 2 groupes dans un espace très restreint, néanmoins ils ont réussi un peu à se dispatcher. Donc ça va bien et on a un grand espoir de pouvoir agrandir le terrain d’ici peu, dans l’année à venir, je pense.
Univers-nature – Le premier groupe c’est constitué à partir des chevaux venant de captivité, s’est-il créé rapidement ?
Corinne Dohin - Oui très rapidement, avec une échelle de dominance chez les juments aussi.
Univers-nature – Dans quelles conditions vivent-ils actuellement, sont-ils assistés, ont-ils un apport de nourriture, des abris, des contacts avec l’homme ?
Corinne Dohin - Ils n’ont aucun apport de nourriture, donc le cycle qui se déroule en fait est que les chevaux broutent, prennent leur provision d’herbe au printemps et en été. A l’automne le terrain est recouvert de neige, ils grattent la neige et vivent sur leurs réserves.
Pour ce qui est du contact avec l’homme, aucun contact, s’il arrive un malheur à un cheval il faut qu’il se rétablisse, nous on n’intervient pas. Ils ont un point d’eau dans une bergerie caussenarde qui est la bienvenue, car les chevaux peuvent s’y abriter pendant l’été et être à l’abri des insectes. Il y a également un deuxième point d’eau sur le terrain, et puis tous les jours, des observations comportementales sont faites par Sébastien, qui est permanent et vit sur le site. Il se tient à l’écart du troupeau et fait ses observations à 10 mètres du troupeau, il n’a aucun contact avec les chevaux.
Univers-nature – Pourquoi ces chevaux n’ont-ils jamais été domestiqués ?
Corinne Dohin - Parce que ce n’est absolument pas possible, si vous voulez le cheval przewalski est différent de tous les autres chevaux du monde, il a une paire de chromosomes supplémentaire, ce qui en fait un cheval sauvage. Si vous voulez on peut faire la même comparaison avec tous les chiens domestiques qui existent et les loups. Un loup, on pourra toujours essayer d’en avoir un chez-soi, à l’âge adulte il aura un comportement sauvage, le cheval de przewalski c’est pareil. Il y a des gens qui ont essayé de domestiquer des chevaux de przewalski, ils y arrivent soit par la force, en entravant les antérieurs ou des choses comme ça, mais bon ce n’est absolument pas naturel. Pour l’anecdote, j’ai discuté avec une personne qui fait partie de l’équipe de Bartabas et qui a eu 2 chevaux de przewalski, lui s’y connaît en chevaux, mais bon, il a tout essayé, et il a été obligé de s’en séparer, impossible de faire quoi que ce soit avec ces chevaux-là !
Univers-nature – Où ils se trouvent actuellement il n’y a pas de prédateurs, ils sont maintenant 30 et vous ne pourrez pas étendre indéfiniment les limites du terrain, que va t’il se passer au bout d’un moment, lorsque vous arriverez à une surpopulation, ne risque t’il pas d’y avoir des problèmes de co-sanguinité avec les 3 étalons ?
Corinne Dohin - Il y a plus d’étalons que ça !
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Energie
Interview : le concept Ecowatt pour lisser les pics de consommation
ÉcoWatt Bretagne est une démarche éco-citoyenne et gratuite qui a pour objectif d’inciter les bretons à modérer leur consommation d’électricité, en particulier en hiver, le matin et entre 18h et 20h. Sandrine Morassi, responsable de la communication répond aux questions d’Univers Nature.
1/ Pouvez-vous nous présenter le concept d’Ecowatt ?
Le dispositif ÉcoWatt déclenche des alertes lors des périodes à risques, dans l’esprit des journées vertes, orange ou rouges de Bison futé, afin d’inviter tous les bretons à pratiquer les bons gestes énergie.
Pour recevoir gratuitement ces alertes (par mail, sms, appli mobiles…) et ainsi procéder aux Eco’gestes, il suffit de s’inscrire depuis le site internet dédié : www.ecowatt-bretagne.fr
Aujourd’hui, la démarche compte plus de 50 000 inscrits.
2/ Comment a t-il vu le jour ? Ce dispositif peut-il être étendu aux autres régions françaises ?
La démarche ÉcoWatt Bretagne a été initiée en novembre 2008 par RTE (Réseau de Transport d’Electricité), et ses partenaires (la Préfecture de Région Bretagne, le Conseil régional de Bretagne, ERDF et l’ADEME), pour répondre aux risques de coupures d’électricité en Bretagne, lors des pics de consommation.
Ce dispositif a été mis en place en raison de la fragilité électrique que connaît la Bretagne. En effet, avec une croissance de la consommation électrique supérieure à la moyenne nationale, la Bretagne est dans une situation fragile : véritable péninsule électrique, la région est située en « bout de réseau », l’électricité devant être acheminée sur de longues distances depuis les centrales principalement situées dans la vallée de la Loire. La production est par ailleurs loin de couvrir tous les besoins, la région ne produisant que 11% de l’électricité qu’elle consomme. Dans ce contexte, les risques de coupures peuvent survenir, lors des pointes de consommation en hiver, notamment en cas d’incident sur un moyen de production ou sur le réseau électrique.
Aujourd’hui, il existe en Bretagne et en région PACA (www.ecowatt-paca.fr), les deux seules régions en France qui connaissent une situation de péninsule électrique.
3/ Le but est de lisser les pics de consommation ? Comment cela fonctionne ?
Les risques de coupure interviennent lors des pics de consommation en hiver, qui ont lieu en Bretagne le matin et le soir (entre 18h et 20h). L’enjeu est donc d’inviter les bretons à procéder aux bons gestes sur ces instants, afin de contribuer à baisser ces pointes et donc à lisser la courbe de consommation sur la journée.
4/ Quels sont les résultats dont vous disposez sur les précédentes éditions ?
A titre d’exemple, nous avons pu évaluer que, lors de la vague de froid de février 2012, les effets des gestes des inscrits durant les 7 jours de froid, se sont traduits par une réduction de la consommation qui a pu atteindre jusqu’à 2 à 3% aux heures les plus chargées, l’équivalent de la consommation cumulée des villes de Quimper, Saint-Malo et Vannes.
5/ Quelles sont les principales actions que les particuliers peuvent mettre en place pour réduire leur consommation électrique ?
Pour réduire la consommation lors des pics, il existe des gestes simples à mettre en place à la maison ou sur le lieu de travail : il s’agit par exemple d’éviter pendant le temps de l’alerte d’utiliser la machine à laver, le lave-vaisselle ou le four ; pour le chauffage électrique, de baisser le thermostat…
6/ Quel rôle peuvent jouer les énergies renouvelables dans ce système ? Quelle part représentent les énergies renouvelables au niveau régional ?
Le déclenchement d’une alerte EcoWatt dépend des prévisions de consommation réalisées par RTE, à partir de plusieurs paramètres : consommation, production, disponibilité du réseau, météo. La production émise par les énergies renouvelables est donc prise en compte. Toutefois, du fait de son intermittence, cette production est plus difficilement prévisible qu’une production classique. Aujourd’hui, RTE dispose d’un outil IPES (Insertion de la Production Eolienne et photovoltaïque sur le Système). Installé dans les dispatchings (les « tours de contrôle de l’électricité »), cet outil permet de disposer d’une prévision de production éolienne et photovoltaïque heure par heure pour la journée en cours et le lendemain, en fonction des prévisions de vent et d’ensoleillement.
La production des énergies renouvelables en Bretagne en 2012 représentait 89% de la production totale d’électricité en Bretagne.
Habitat
Interview avec Vidal Benchimol, auteur de « Vers un nouveau mode de ville»
En 2007, dans un contexte de crise écologique et économique, Vidal Benchimol conçoit les « Écofaubourgs », un concept d’habitat collectif écologique. Il vient de publier l’ouvrage « Vers un nouveau mode de ville », aux Éditions Alternatives, co-écrit avec Stéphanie Lemoine qui souhaite dresser un état des lieux des tendances et un inventaire des pratiques contemporaines de la fabrique de la ville.
Votre livre s’appelle vers un nouveau mode de ville, quel est selon vous le visage de la ville contemporaine ?
En Europe, la ville contemporaine est en pleine transformation. Les élus et les urbanistes voient bien que les modèles d’aménagement fondés sur la séparation des fonctions urbaines (on mange d’un côté, on travaille ailleurs, etc.), et qui ont prévalu ces cinquante dernières années, ne marchent pas. Il faut inventer autre chose ! C’est ce à quoi s’emploie l’urbanisme durable, qui cherche à rendre la ville plus compacte, plus économe en ressources et plus solidaire…
Quelles sont les principales mutations (habitat, mobilité, mode de consommation) qu’opère la ville depuis quelques décennies ? En quoi la ville évolue à l’aune des problématiques environnementales ?
Les transformations les plus visibles ces dernières années sont liées à la nécessité de maîtriser l’énergie. Dans le bâtiment, cela se traduit par l’adoption de réglementations thermiques plus contraignantes. Depuis l’an dernier, la RT 2012 oblige ainsi les maîtres d’ouvrage à concevoir des bâtiments 4 fois plus performants qu’un immeuble haussmannien. De la même manière, les métropoles cherchent de plus en plus à encourager les alternatives à la voiture, que ce soit via l’offre de transports en commun et de vélos en libre service ou l’aménagement de zones 30. L’objectif est de grignoter petit à petit l’espace dévolu à la voiture, en vue d’un meilleur partage modal.
Quels sont les principaux défis qui attendent la ville actuelle pour devenir « durable » ?
L’adaptation au changement climatique, avec ce qu’elle implique d’incertitude, est l’un des premiers défis auxquels doit s’affronter la ville contemporaine. Pour y faire face, les villes ont tout intérêt à devenir résilientes : elles doivent diversifier leurs modes de production, leur approvisionnement, et apprendre à compter sur les ressources locales. D’où les projets d’agriculture urbaine qui fleurissent un peu partout, mais aussi l’essor des circuits courts et de la consommation collaborative…
Selon vous, quelles sont les initiatives actuelles les plus pertinentes pour la fabrique de l’espace urbain ?
Toutes celles qui s’opposent à l’aménagement « autoritaire » de la ville, et conçoivent l’écologie urbaine en relation étroite avec la démocratie locale. Si la fabrique de l’espace urbain n’est pas le fruit d’une négociation, et même pourquoi pas d’un conflit fécond entre décideurs et citoyens, elle a peu de chance de déboucher sur un cadre de vie vraiment durable. A cet égard, l’exemple des écoquartiers nord-européens est édifiant : ceux qui parviennent le mieux à concilier qualité de vie et économie de ressources sont nés d’une implication forte de leurs habitants, et parfois d’un bras de fer corsé avec la municipalité…
Quels sont les freins actuels au développement de la ville durable ?
Ils sont nombreux ! La crise économique, qui a partiellement détourné les citoyens des enjeux écologiques, en est un. Certains voient pourtant dans cette crise une conséquence de nos choix énergétiques. La ville contemporaine est aussi de plus en plus clivée socialement. Dans ces conditions, la mixité sociale, même avec ce qu’elle a de compliqué à mettre en œuvre, devient un véritable enjeu…
Habitat
« On ne peut plus construire aujourd’hui comme il y a quelques années ou décennies »
Olivier Silder et Philippe Bovet, deux spécialistes de l’énergie et de l’habitat viennent de publier l’ouvrage « Bâtiments performants. Des constructeurs relèvent le défi du réchauffement climatique » aux éditions Terre Vivante. Philippe Bovet a répondu aux questions d’Univers Nature sur l’enjeu que représente l’habitat dans la transition énergétique.
1/ Qu’est ce qui vous a motivé à écrire cet ouvrage ?
D’abord la rencontre avec Olivier Sidler, un des énergéticiens les plus compétents d’Europe et un excellent pédagogue pour toutes ces questions énergétiques. Ensuite connaître ces décideurs qui ont compris que la donne énergétique avait changé et qu’on ne peut plus construire aujourd’hui comme il y a quelques années ou décennies.
2/ Sur quels critères avez-vous sélectionné les bâtiments ?
Des critères essentiellement géographiques, afin que nous n’ayons Olivier et moi-même peu à nous déplacer. Tous les entretiens ont eu lieu dans un triangle Paris-Valence-Mulhouse. Olivier habite dans la Drome et moi à Bâle. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’exemples intéressants en Bretagne ou à Toulouse, mais pour nous cela évitait des déplacements inutiles et nous permettaient aussi d’être cohérents en matière d’énergie et de transports.
3/Quels sont les freins actuels à lever pour favoriser la transition énergétique dans ce secteur ?
Comme je l’explique dans l’introduction, la forte inertie des mentalités entraine une certaine difficulté pour mettre en place le changement. Aussi, on relève des freins réglementaires comme la garantie décennale (qui protège pendant 10 ans après la livraison l’acquéreur contre tout vice de construction) qui opère comme un frein à l’innovation, des freins liés à à la formation et au manque de compétences de certains corps de métiers ainsi que des difficultés de financement.
4/ Quel projet a particulièrement retenu votre attention ? Pourquoi ?
Tous sont intéressants car différents. De la maison individuelle rénovée à l’immeuble neuf de bureaux à énergie positive de la ZAC de Bonne. Cette diversité montre qu’un changement est possible dans tous les secteurs du bâti et rapidement si on le veut et si on s’en donne la peine.
5/ En moyenne, quel est le surcoût pour construire des bâtiments basse consommation ?
On doit ne pas parler de surcoût, mais de surinvestissement, mais avoir ensuite des factures énergétiques plus faibles. Il y a de multiples surcoûts acceptés et jamais remis en cause, comme les places de parkings en grande partie inutile dans les centres urbains bien desservis par les transports en commun. Ou encore une entrée d’immeuble en marbre, alors que d’autres matériaux peuvent être choisis. Et au delà, le dérèglement climatique nous oblige à agir. Quand quelqu’un se noie et qu’on doit lui jeter une bouée, on ne discute pas du prix de celle-ci.
6/ C’est quoi pour vous un bâtiment intelligent ?
C’est avant tout un bâtiment low-tech (et non high-tech) performant. Il ne faut empiler les systèmes énergétiques et avoir des bâtiments complexes.
7/ La prochaine RT 2020 qui généralisera le Bepos est-elle une réponse suffisante pour atteindre les objectifs de réduction de CO2 fixés par la France ?
Absolument pas puisque nous émettons du CO2 selon 4 axes: l’habitat, les transports, les achats et les déchets. Le bâtiment n’est donc qu’un des 3 secteurs. De plus le bâtiment neuf ne représente qu’1% du parc annuel de logement mis en chantier, il faut absolument s’attaquer à la rénovation du parc existant.