Pollution - Déchêts
Le droit européen applique le principe pollueur/payeur dans laffaire Erika
En 1999, la société italienne ENEL passait un contrat avec la compagnie Total pour assurer le transport dune cargaison de fioul lourd depuis le port français de Dunkerque jusquà celui de Milazzo en Italie. Pour permettre à ce contrat daboutir, Total S.A. France a vendu le fioul en question à la société Total International Ltd, laquelle prit en charge lacheminement en affrétant un cargo dont le nom malheureusement devait devenir célèbre : lErika. Celui-ci narrivera jamais à bon port, sombrant le 12 décembre de la même année au large des côtes bretonnes (Finistère, France). Au cours de ce naufrage, près de 20 000 tonnes de fioul lourd seront déversées sur 400 kms de côtes.
Face à lampleur de la catastrophe, des poursuites judiciaires furent engagées, naboutissant à un verdict que 8 ans après le sinistre. Le 16 janvier 2008, le tribunal français reconnut ainsi pour la première fois une part de responsabilité à laffréteur dun chargement. Accusé de « faute dimprudence », Total fut condamné à une amende de 375 000 , à laquelle sajoutèrent des frais de dommages et intérêts.
Mais lhistoire ne se termina pas là, la question du dédommagement des parties civiles restant toujours en suspens. Pour pallier à une carence du droit international quant à la prise en compte du préjudice environnemental, la Cour de Justice des Communautés Européennes fut saisie. Après délibérations, elle a publié hier son arrêté.
Au grand bonheur des collectivités victimes de la marée noire, la Cour de Justice a ainsi donné gain de cause à la commune de Mesquer (Pays de la Loire). Constituée Partie civile, celle-ci défendait le principe selon lequel des hydrocarbures déversés en mer, même accidentellement, doivent être considérés comme des déchets intégrant la directive européenne homonyme. Ayant reçu lassentiment de la Cour, cette clause implique dès lors que les sociétés Total International Ltd et Total S.A. France soient identifiées comme étant respectivement le « détenteur antérieur » et le « producteur du produit générateur ». Or, au regard de la directive « déchets », il revient à ces deux entités distinctes dassumer légalement les coûts liés à lélimination des déchets générés.
La législation permet néanmoins au propriétaire du navire et à laffréteur de bénéficier de « limitations ou dexonérations de responsabilité », laissées au jugement des Etats membres impliqués. Cette disposition dépend cependant de la disponibilité des fonds mis en place à cet effet, à limage du Fonds international dindemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL).
Quelle que soit la décision finale de la Cour de cassation française, elle devrait être défavorable au groupe Total car dans léventualité où laffréteur se verrait effectivement exonéré (Total International Ltd), cest alors la responsabilité du producteur (Total S.A. France) qui serait engagée. Toutefois, « en vertu du principe pollueur/payeur, un tel producteur ne pourra être tenu de supporter ces coûts (délimination des déchets) que si, par son activité, il a contribué au risque de survenance de la pollution occasionnée par le naufrage du navire ». Ce sera donc au droit national français de transiger.
ACTUALITE
Les emballages plastique de retour chez Tropicana
Le 16 juin dernier, les pays du G20 ont conclu, après deux jours de réunion au Japon, un accord sur la réduction des déchets plastique. Rien de contraignant pour l’instant, mais un premier pas vers une réglementation future plus stricte qui empêchera notre planète d’étouffer sous la pollution plastique. Faut-il le rappeler, sur les quasi 500 millions de tonnes de plastique produites chaque année, huit millions sont déversées chaque année dans les océans, et environ un tiers finit dans la nature. Une ballade en forêt ou un regard attentif posé sur les abords des autoroutes françaises achèveront de vous convaincre de la réalité et de l’urgence de cette situation.
Au moment-même où tous ces pays annonçaient un accord, une entreprise prenait la direction opposée, puisque Tropicana annonçait fièrement renoncer aux briques en carton pour ses jus de fruits, pour les remplacer par des bouteilles en plastique. Evidemment, la réaction des consommateurs ne s’est pas faite attendre bien longtemps : de nombreux appels au boycott de la marque ont vu le jour, et la marque, propriété de la multinationale PepsiCo, se fait étriller sur les réseaux sociaux.
Mais qu’est-il passé dans la tête des décideurs de Tropicana pour prendre une telle décision en 2019 et en faire la publicité comme s’il s’agissait d’annoncer la mise en rayons de nouvelles recettes de jus de fruits ? A priori, « les consommateurs veulent de la transparence. Ils veulent voir le produit et la couleur est un critère important de choix et d’attractivité », d’après un cadre de PepsiCo. Sauf qu’on l’a vu, les consommateurs s’expriment en masse contre les nouvelles bouteilles en plastique.
Au moins la marque aurait-elle pu avancer la relative complexité à recycler les emballages en carton alimentaire : composés aux 3/4 de carton, à 5% d’aluminium et à 20% de polyéthylène (pour assurer l’étanchéité des packagings), ils nécessitent un procédé de recyclage aussi efficace que complexe. Le recyclage du plastique PET dont sont faites les bouteilles étant, lui, bien plus répandu. Malgré cela pourtant, quand 26% des briques alimentaires sont recyclées à l’échelle de la planète, 9% du plastique seulement connaît le même sort.
Ultime scandale : l’ONG FoodWatch a observé les nouveaux packagings et a constaté non seulement une baisse de la contenance (désormais 900 mL contre 1L auparavant), mais aussi une hausse de 38% du prix du produit ! Les innombrables réactions au choix de Tropicana n’ont pour l’instant provoqué aucune réponse de la marque, qui devrait donc logiquement poursuivre son objectif de convertir, d’ici à quelques mois, ses emballages carton en bouteilles plastique.
A moins qu’une mobilisation d’envergure…
Photo : MartinBrigden/Flickr/CC
ACTUALITE
Le taux de CO2 intègre la météo britannique
Cela n’a l’air de rien, quelques centimètres carré de rien du tout dans un journal qui compte des dizaines de pages, mais cela s’apparente pourtant à une révolution : depuis une dizaine de jours, le Guardian, l’un des quotidiens britanniques les plus réputés, propose à ses lecteurs la concentration en CO2 dans notre atmosphère au sein de son encart « météo ». Mais pas la concentration du Grand Londres non, la concentration mondiale telle qu’elle est mesurée quotidiennement à Hawaii, à l’observatoire de Mauna Loa. Là-bas, au coeur du Pacifique, le taux de CO2 y est mesuré depuis 1958. A l’époque, il s’établissait à 315 parties par million (ppm), encore loin du seuil considéré comme « gérable à long terme » de 350 ppm.
Seulement voilà, depuis, l’activité humaine n’a cessé de croître, de même que notre recours aux énergies fossiles, avec un résultat largement prévisible : le taux de CO2 atmosphérique est désormais de 412 ppm, largement au-dessus des 350 ppm « gérables », supérieur à 2013 (400 ppm), et à mille lieues des 280 ppm estimées à l’ère pré-industrielle. Dans des paroles rapportées par Le Monde, la rédactrice en chef du Guardian justifie ce choix éditorial inédit :
« Les niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère ont augmenté de façon si spectaculaire. Inclure une mesure de cette augmentation dans notre bulletin météorologique quotidien montre ce que l’activité humaine fait à notre climat. Il faut rappeler aux gens que la crise climatique n’est plus un problème d’avenir. Nous devons nous y attaquer maintenant, et chaque jour compte. »
En présentant chaque jour à ses millions de lecteurs une donnée scientifique incontestablement liée au changement climatique, The Gardian entend ne pas perdre de vue l’ambitieux objectif mondial de réduction de moitié des émissions de CO2 d’ici 2030, pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré. Ne soyons pas pessimistes bien sûr, mais il faut bien reconnaître que cela semble bien mal parti.
Au fait, à quand un journal français qui reprendrait la démarche du Guardian ?
ACTUALITE
C’est la semaine des alternatives aux pesticides
A chaque jour sa journée mondiale de quelque chose, et à chaque semaine, sa semaine de quelque chose. Le 13 janvier par exemple, nous célébrons la journée sans pantalon. Le 6 mai prochain, c’est le coloriage qui sera à l’honneur. Parfois, l’environnement peut être mis en avant. Ainsi, lundi 18 mars dernier, c’était la journée mondiale du recyclage. Et mercredi 20, la journée internationale sans viande. Hier marquait aussi le lancement de la semaine pour les alternatives aux pesticides, qui a cette année la biodiversité pour thème.
Et c’est peu dire qu’en France, cette semaine est plus que nécessaire. Car selon les chiffres officiels, notre pays consommerait pour son usage agricole plus de 72 000 tonnes de produits phytosanitaires par an, soit 3,7 kilos par hectare cultivé, ce qui nous place au deuxième rang européen. Champagne ? Pas vraiment non, car ces usages massifs d’engrais et de pesticides ont des conséquences dramatiques. Non seulement ils pénètrent les sols et empoisonnent les nappes phréatiques, mais ils contribuent largement à l’éradication de nombreuses espèces végétales et animales, au premier rang desquelles les abeilles.
Pourtant, des alternatives à ces produits issus de la chimie agricole existent. Certaines espèces végétales peuvent vivre en symbiose : planter de l’arachide et du maïs sur une même parcelle éloignera par exemple les parasites de la céréale ; un lâcher de coccinelles viendra efficacement à bout d’une invasion de pucerons dont elles raffolent, etc…
La fin de la dépendance à ces substances qui rendent richissimes les actionnaires de Bayer-Monsanto s’annonce cependant : la demande en produits bio ne cesse de croître en France, notre pays a enregistré en 2018 un record de conversions d’agriculteurs du conventionnel en biologique, et d’ici 2022 les surfaces agricoles traitées en bio devraient avoir doublées dans l’Hexagone.
D’ici là, et jusqu’au 30 mars (oui, nous sommes au courant, cette « semaine » dure 10 jours), vous pouvez toujours vous renseigner près de chez vous sur les multiples alternatives qu’il existe dès aujourd’hui aux pesticides : des centaines d’événements (de la balade à la conférence, en passant par des expositions ou des projections de films) sont déjà répertoriés partout sur le territoire, vous en trouverez forcément un près de chez vous en suivant ce lien…
Photo : CGPGrey/Flickr/CC